Ecouter les autres (D. Bonhoeffer)

De la vie communautaire (extrait du livre):
 
Écouter les autres

Le premier service dont nous sommes redevables aux autres membres de la communauté, c’est de les écouter. De même que le commencement de notre amour pour Dieu consiste à écouter sa Parole, de même le commencement de l’amour du prochain consiste à apprendre à l’écouter. C’est le propre de l’amour de Dieu pour nous qu’il ne se borne pas à nous parler, mais aussi à nous écouter. Apprendre à écouter notre frère, c’est donc faire pour lui ce que Dieu a fait pour nous.
Beaucoup de gens cherchent une oreille qui veuille les entendre, et ils ne la trouvent pas chez les chrétiens, parce que les chrétiens se mettent à parler là où ils devraient savoir écouter. Mais celui qui ne peut plus écouter son frère finit par ne plus pouvoir écouter Dieu lui-même et vouloir sans cesse lui parler. 

On peut écouter à demi, en se persuadant qu’au fond on sait déjà tout ce que l’interlocuteur a à dire. C’est l’attitude impatiente, distraite, qui méprise le prochain et où l’on n’attend que le moment de pouvoir enfin placer son mot pour être quitte. C’est là trahir notre service, et il est certain qu’ici également notre attitude à l’égard du prochain n’est que le reflet de notre relation avec Dieu

Notre société païenne n’ignore pas, elle, que souvent, pour apporter une aide efficace, il faut consentir à écouter sérieusement, et elle a édifié sa propre cure d’âme, de caractère laïque, qui attire la foule des hommes d’aujourd’hui et même des membres d’église. 

Pendant ce temps, les chrétiens oublient qu’ils ont reçu ministère d’écouter de la part de Celui qui est « l’Auditeur » par excellence et qui veut nous faire participer à son œuvre. Nous devons écouter avec les oreilles de Dieu afin de pouvoir nous adresser aux autres avec sa Parole.

S’entraider

Le second service que nous devons nous rendre mutuellement au sein de la communauté chrétienne, c’est d’être prêts à nous entraider journellement. Nous pensons d’abord simplement à l’aide matérielle, dans les moindres choses dont est faite la vie de n’importe quelle communauté. Personne ne doit se croire au-dessus de telles tâches. Craindre de perdre du temps en les acceptant, c’est donner trop d’importance à ce qu’on fait. Nous devons être toujours prêts à accepter que Dieu vienne nous interrompre. Il viendra journellement se mettre en travers de nos chemins et de nos plans humains, par ses exigences répétées. 

Pris par nos importantes obligations journalières, nous pouvons passer outre comme le prêtre devant l’homme tombé au milieu des brigands, et cela peut être… au moment même où nous lisons la Bible. Nous passons ainsi à côté du signe que Dieu place bien en vue dans notre vie, pour nous montrer que ce n’est pas notre voie mais Sa voie qui compte. 

En réalité, nous ne devons pas retenir notre main lorsqu’elle peut rendre un service, et nous n’avons pas à régir nous-mêmes notre temps mais à laisser Dieu le remplir : cela fait partie de l’école de l’humilité.

Et quand nos mains ne suffiront pas à accomplir l’acte d’amour et de compassion qui doit nous trouver chaque jour disponibles, c’est notre bouche qui devra peut-être prononcer, avec la joie et la force convaincante de la foi, la parole de sympathie active qui s’impose.

Dietrich Bonhoeffer
De la vie communautaire,
1939, Cerf, Labor et Fides, 1983
Pasteur et théologien de l’Eglise Luthérienne en Allemagne
exécuté par les Nazis en 1945,
à l’âge de 39 ans.

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